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Mélanie

Le chlordécone, le pesticide qui ravage les Antilles

Dernière mise à jour : 30 janv. 2020


Selon Santé publique France, plus de 90% de la population adulte en Guadeloupe et Martinique est contaminée par la chlordécone, un pesticide très dangereux utilisé dans les plantations de bananiers aux Antilles de 1972 à 1993. Ce lundi 14 octobre, la ministre de la santé Agnès Buzyn a appelé à bâtir un nouveau plan plus audacieux face à l’urgence sanitaire et environnementale.


Qu’est-ce que le chlordécone et à quoi servait-il ?


Il s’agit d’un pesticide organochloré de synthèse qui a été autorisé à partir de 1972 en France dans le cadre de la lutte contre les charançons et autres insectes ravageurs dans les plantations de bananiers en Martinique et en Guadeloupe.


Quels sont les dangers de l’utilisation de ce pesticide ?


Selon un compte rendu réalisé par le Groupe Inter-Alliances et le Groupe d’Observation et du suivi scientifique, les premières données toxicologiques dans les années 1960 ont permis d’identifier la chlordécone comme pesticide aux États-Unis sous le nom de Kepone. Pourtant, la France a quand même continué à le commercialiser.


La pollution de sols et la contamination de la faune sauvage par la chlordécone aux Antilles ont été documentées pour la première fois par des chercheurs de l’INRA en 1977 et en 1979, et il a été déclaré comme cancérogène possible, neurotoxique et reprotoxique pour l'Homme par l’OMS.


Ce n’est qu’en 1990 que la France décide de l’interdire la chlordécone dans l’hexagone et en 1993 au Antilles. On a constaté un peu plus tard, en 1999, l’extension de cette pollution aux eaux destinées à la consommation humaine ainsi qu’à diverses denrées alimentaires locales, végétales et animales, terrestres et aquatiques. Il peut également rester dans le sol pendant des siècles.


Depuis, concrètement, quelles sont les démarches effectuées par l’État et la science pour lutter contre cette épidémie ?


Le site Plan chlordécone, relié au site gouvernemental du préfet de la région Guadeloupe, nous informe que depuis 2008, l’État français et ses opérateurs comme l’INSERM ont mobilisé d’importants moyens, qui ont conduit notamment à la sensibilisation et à la protection de la population, au soutien des professionnels impactés mais aussi à l’amélioration des connaissances sur le chlordécone avec le développement de la recherche scientifique.

Le même compte rendu a réuni les études menées jusqu’ici qui notamment permit d’établir le lien entre l’exposition à la chlordécone et des maladies telles que le cancer de la prostate et les maladies rénales, neurodégénérative, est neurotoxique, reprotoxique, perturbateur endocrinien, perturbateur du développement embryonnaire.


Selon l’étude Kannari qui a été mise en œuvre en 2013 par l’Anses et d’autres institutions gouvernementales, la grande majorité des travailleurs agricoles dans les bananeraies antillaises y ont été exposés à l'époque où elle était utilisée (77 % en 1989) et sont encore exposés aujourd'hui.


Dans cette même étude appuyer par une autre menée par l’INSERM, le lien entre exposition a la chlordécone et les cas de cancer de la prostate n’a cependant pas été clairement établît, alors que d’autres sources scientifiques déplorent en 2018, un taux de malade aux Antilles deux fois supérieur à celui constater dans l’hexagone.

Des divisions aussi sur la question de nombre de sols contaminés, certains partis pris déplorent la présence systématique de produits de transformation de la chlordécone dans tous les échantillons de sols contaminés, quand d’autres affirment que seules 40% des terres sont concernées.


Et ce ne sont pas les seuls puisque de nombreux débats et questionnements restent de mise…


Notamment sur le coût trop élevé du dépistage sanguin qui permet d’évaluer le niveau de contamination.


Aussi, d’après le Magazine de la santé, en février 2019, huit associations auraient écrit au président de la République Emmanuel Macron, pour réclamer une tolérance zéro sur la chlordécone. Elles ont rapporté que, je cite « le taux de chlordécone accepté présente des risques pour la santé » et exigeant que, « dans un délai rapide ne dépassant pas le 1er janvier 2020, tous les produits offerts à la consommation en Martinique et en Guadeloupe en soient totalement exempts ».


Objectif que la ministre des outre-mer, Annick Girardin, officialisera en juin 2019 après que le gouvernement ait débloqué une aide de 5,4 millions d’euros. Par ailleurs, le président Emmanuel Macron dit reconnait l’urgence sanitaire et parle même de « scandale environnemental ».


En juillet 2019, le Figaro annonce la plainte portée par deux associations contre X après des disparitions d’archives publiques dévoilée devant une commission d'enquête parlementaire qui examine l'impact économique, sanitaire et environnemental du pesticide. Cette absence avait déjà été relevée dans un rapport parlementaire de 2005 mais l’affaire a été étouffée. Les associations parlent d’une « atteinte intolérable à la mémoire collective »

Invité de la radio France Culture en octobre 2019, Malcom Ferdinand, chercheur au CNRS, affirme que cette catastrophe n’est pas accidentelle et que la chlordécone a été utilisée en

dépit d’autres moyens plus naturels.


La commission d’enquête sur l’impact du chlordécone a terminé ses travaux en public. Elle prépare son rapport pour le 4 décembre 2019. 80 personnes parmi lesquelles associations écologistes, organismes de santé et certains professionnels sont convoqués pour faire le point sur le sujet.


Mais de nombreuses questions restent en suspens : Pourquoi l’état français a-t-il autorisé le chlordécone malgré l’interdiction aux États-Unis ? Les victimes vont-elles et comment vont-elles être indemniser ? Quel est l’avenir de la culture de la banane aux Antilles sachant qu’elles sont la plus grande source de richesse de l’île ?

Affaire à suivre…


Crédit photo : Défi média

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